Prédication disponible en format audio.

À La Réunion, beaucoup de crimes ont lieu dans le cadre de la famille et du voisinage. Des conflits conjugaux et de vieux différends avec des voisins, souvent sur fond d’alcool et du zamal, aboutissent à des actes impulsifs violents.
Arrivé en prison, le détenu porte en lui les paroles de dénonciation qui l’ont conduit à la privation de liberté. Le serpent de la vengeance rampe autour de lui : « À la sortie, tu te vengeras et tu te sentiras bien. »
Il n’est pas évident de cheminer vers la paix intérieure et le pardon. Pardonner ne veut pas dire oublier, encore moins sous-estimer les injustices et les souffrances. Le mot pardon porte en lui le mot « don » : le don de la bienveillance à la place de la vengeance. Pardonner équivaut à vouloir du bien à l’autre, pas nécessairement à devenir son ami.
Un jour, un prêtre d’un diocèse en métropole, me disait : « Je ne peux pas prier pour mon évêque. » Je lui ai proposé alors de prier pour son évêque, ne serait-ce que pour sa conversion ! Le pardon des ennemis s’enracine dans la prière.
Pardonner ne veut pas dire : « Tout le monde est beau, tout le monde est gentil ». Sur la croix, Jésus a pardonné à ses bourreaux en hurlant de douleur. Pardonner fait mal. Mais le pardon finit par libérer l’homme intérieur.
Jésus nous a dit : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire » (Jn 15, 5). Sans la grâce du Christ, nous ne pouvons pas pardonner à ceux qui nous ont blessés.

garde-à-vue

En ce temps de Carême, plus que jamais, Jésus nous demande de pardonner à nos ennemis de manière à vaincre le mal par le bien (cf. Rm 12, 21) : « Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, il fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes » (Mt 5, 44-45).
En ce temps de Carême, l’aujourd’hui de Dieu, il nous est demandé d’aller plus loin sur la route de notre foi : « Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense méritez-vous ? Les publicains eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Et si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ? Les païens eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait » (Mt 5, 4-47).
Le disciple de Jésus pardonne comme son maître par la grâce de l’Esprit Saint. Le chrétien se caractérise par sa non-violence. Invoquer Dieu pour se venger représente un blasphème.
Le frère dominicain Henri Didon avait donné la devise des Jeux olympiques à Pierre de Coubertin : « plus vite, plus haut, plus fort » (« citius, altius, fortius »). En ce Carême, temps de combat spirituel pour dépasser la médiocrité et la tiédeur, allons plus vite, plus loin et plus fort dans le don de nous-mêmes au Seigneur et au service de notre prochain.

Fr. Manuel Rivero O.P. – Chemin de Carème

Transcription audio : Manuel Rivero