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En lançant l’année Jubilaire de la Miséricorde, le Pape François a écrit : « Le regard fixé sur Jésus et son visage miséricordieux, nous pouvons accueillir l’amour de la Sainte Trinité. La mission que Jésus a reçue du Père a été de révéler le mystère de l’amour divin dans sa plénitude. L’évangéliste Jean affirme pour la première et unique fois dans toute l’Ecriture : « Dieu est Amour » (1 Jn 4, 8.16). Cet amour est désormais rendu visible et tangible dans toute la vie de Jésus. Sa personne n’est rien d’autre qu’amour, un amour qui se donne gratuitement. »
Désormais, nous sommes donc invités à comprendre notre existence, dans la foi, comme se déployant, instant après instant, dans le contexte de ce Dieu Amour, qui est ainsi de toute éternité, et qui ne cesse de se donner gratuitement par amour… Ainsi, depuis que les hommes existent, le Père, qui les a tous créés « à son image et ressemblance » (Gn 1,26-28), les regarde tous comme ses fils, ses filles, et « il les bénit ». Il les aime tous en effet du même Amour, sans aucune exception. « Tu aimes en effet tout ce qui existe, et tu n’as de dégoût pour rien de ce que tu as fait ; car si tu avais haï quelque chose, tu ne l’aurais pas formé » (Sg 11,24). Et pourtant, tous les hommes ont péché (Rm 3,9-20), au sens où, créés libres, ils n’ont pas accordé à leur Dieu et Père l’importance qu’ils auraient dû lui donner dans leur cœur et dans leur vie… Ils se sont détournés de lui, ils ont appris à vivre sans lui… Indifférence, ignorance, et pour beaucoup, c’est très bien comme cela ! Mais de son côté, le Père, même s’il est « délaissé par un grand nombre », même « s’il subit la solitude pour les péchés de ses enfants » (Ba 4,12), n’a jamais cessé de les aimer, tous, sans aucune exception… Cet Amour de Père est gratuit… Rien, absolument rien ne lui enlèvera ce titre de « Père »… C’est Lui qui nous a tous créés gratuitement, par amour. Et il nous aime tous comme un Père, infiniment, gratuitement, et rien, absolument rien, ne pourra faire qu’il en soit autrement… Alors, l’Amour se donne, même s’il ne reçoit « d’un grand nombre », aucun retour… « Votre Père qui est aux cieux fait lever son soleil sur les bons et les méchants, et tomber la pluie sur les justes et les injustes » (Mt 5,45). « Le Seigneur Dieu est un Soleil : il donne la grâce, il donne la gloire » aux bons comme aux méchants, gratuitement, par amour (Ps 84,12). « Toute la mission que Jésus a reçue du Père », écrit le Pape François, « a été de révéler le mystère de l’amour divin dans sa plénitude ». « Voici ce cœur qui a tant aimé les hommes », dit-il, ressuscité, à Sr Marguerite Marie Alacoque, « et qui n’a reçu qu’indifférence !… Toi, au moins, essaie de suppléer » (27 décembre 1673 ; Paray le Monial).

Pape-François
Mais découvrir que nous sommes aimés alors même que notre vie ne correspond pas du tout à l’attente de Dieu est certainement la plus belle expérience qui puisse être faite ici-bas… Et c’est là, dans ce contexte précis, que nous donnons à ce Père qui n’Est qu’Amour le titre de « Père des Miséricordes » (2Co 1,3). Il ne cesse de nous aimer, alors même que nous ne le méritons pas ! Bien plus, nous mériterions d’être rejetés, exclus, chassés… Mais non ! Rien de tout cela… Inlassablement, l’Amour se tient à la porte de notre cœur et il frappe, avec Douceur, avec Délicatesse, avec Tendresse… Et il attend que nous acceptions de lui ouvrir… « Je me tiens à la porte et je frappe… Si tu m’ouvres ton cœur, je ferai chez toi ma demeure » (Ap 3,20). Alors, si nous consentons à lui ouvrir la porte, même si notre vie n’est que désolation et ruines, quelle joie pour notre Dieu et Père de pouvoir enfin nous aimer, nous serrer contre son cœur et nous combler de tous ses biens pour notre seul bonheur. Quelle joie pour lui de voir que pour nous aussi, la tristesse laisse place à la joie, la mort à la vie, la haine et le ressentiment à la paix et à l’amour, la désolation à la Plénitude…
Nous sommes tous en effet ce fils de la Parabole de St Luc, au chapitre 15, qui, un jour, partit vers un pays lointain, et se mit à dilapider ces trésors de vie, de paix et d’amour que notre Dieu et Père nous avait pourtant donnés en nous créant. Et un jour, un sentiment de mal être intérieur, d’insatisfaction profonde, l’a envahi… Non, manifestement, le vrai bonheur n’est pas à chercher par là… Et les relations humaines en ce monde où seuls comptent l’argent et le profit, sont si souvent dures, implacables, incroyablement égoïstes et méprisantes… Alors, il a décidé de « rentrer en lui même » et il s’est dit : « Je veux retourner vers mon Père, et je lui dirai : « Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi. Je ne mérite plus d’être appelé ton fils. Traite moi comme le moins que rien que je suis »… Il amorce donc son premier mouvement de retour, tandis que son Père, de son côté, guette son retour, jour après jour… Et « tandis qu’il était encore loin, son Père l’aperçut et il fut bouleversé de compassion jusqu’au plus profond de lui-même ; il courut se jeter à son cou et il l’embrassa tendrement. Le fils lui dit alors : « Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi, je ne mérite plus d’être appelé ton fils. » Mais le Père lui coupa la parole… Il est hors de question qu’il traite comme un moins que rien celui qu’il n’a cessé d’attendre, celui dont la seule présence remplit son cœur de Père d’une joie immense… « Tu compte beaucoup à mes yeux », infiniment, tu n’es pas « un moins que rien », « tu as du prix, et je t’aime » (Is 43,4)… Je ne peux faire autrement que t’aimer… Je suis ton Père, tu es mon fils… « Alors vite, apportez la plus belle robe et revêtez l’en »… Mais la plus belle robe de la Maison du Père est celle du Père lui-même, une robe « de splendeur, de majesté et de beauté » (Ps 96,6)… « Et vous tous, réjouissez-vous avec moi. Car mon fils était perdu, il est retrouvé ; il était mort, il est vivant » (Lc 15).

Prions : Père, nous en le savons que trop bien. Notre cœur est compliqué et malade, nous sommes si souvent instables et inconstants… Nous ne savons même plus comment faire pour te prier comme il faut… Alors nous venons à toi, sans un mot, tels que nous sommes, et nous t’offrons tout, tout ce qui dans nos vies est misère… Agis en nous selon ton cœur de Père, donne-nous de reconnaître ta Présence, ton action, cette Vie Nouvelle que tu désires voir régner en nous et qui est Lumière pour nos yeux… Alors nous trouverons, avec toi et grâce à toi, cette Paix du cœur qui porte en elle-même le pressentiment, l’avant goût, la certitude que c’est « là », avec Toi, que se trouve le vrai Bonheur…

Jacques Fournier, Diacre – Chemin de Carème

Transcription audio : Jacques Fournier