De « Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » à « Père, je m’abandonne à toi » – Jeudi 23 MARS – 3° semaine de Carême

Prédication disponible en format audio.

Pourquoi mes parents sont-ils morts ?

Pourquoi m’ont-ils abandonné ?

Voilà la question que se posent tous ceux qui  font l’expérience de la mort d’un être cher, surtout si l’on est un enfant.

Ce fut sans doute la question que s’est posée le jeune Charles de FOUCAULT lors de la mort de ses parents.

L’abandon… N’y a-t-il mot plus ambigu !

Or, cet homme a fait l’expérience tragique d’être orphelin à l‘âge de six ans.

Il faudra un long chemin humain et spirituel pour passer de « Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » à « Père, je m’abandonne à toi ».

C’est déjà l’expérience humaine et psychologique que nous faisons tous lors de notre naissance.

Nous étions si bien dans le ventre de notre mère : nous étions nourris, chauffés et le tout gratuitement, s’il vous plaît. C’était en quelque sorte le paradis. Et voilà que notre mère nous a expulsés de son ventre. Si nous avions pu parler, nous aurions dit : « Mère, pourquoi m’as-tu abandonné ? Pourquoi es-tu si dure que tu m’aies rejeté hors de ton ventre, où je ne faisais qu’un avec toi et où j’étais bien ? »

Il m’a fallu m’abandonner entre les bras du gynécologue, un étranger, pour qu’il m’aide à sortir. L’accouchement ressemble à une certaine mort pour naître à une autre vie.

Il m’a fallu aussi m’abandonner peu à peu entre les mains de ma mère, de mon père et de bien d’autres personnes et parfois passer de mains en mains. Et c’est ainsi que je suis né peu à peu à la vie et que j’ai grandi. Il faut toujours, quelque part, mourir à soi-même, à l’Ego, qui prend toute la place, pour naître à la vraie vie.

Quand naît l’être humain, il a les poings fermés. Il lui faudra toute la vie pour apprendre à les ouvrir. Mais en ouvrant ses mains et ses bras pour apprendre à aimer, il devient une croix. Or la Croix est le symbole de l’Amour de Dieu. Et c’est sur cette croix que Jésus prononcera sa prière d’abandon entre les mains de Dieu.

La vie spirituelle est un continuel enfantement à la vie de Dieu en nous.

Thérèse de l’Enfant Jésus a osé écrire : « Oh, non, je ne suis pas toujours fidèle, mais je ne me décourage jamais. Je m’abandonne dans les bras de Jésus ».

Mais, on ne s’abandonne pas dans les bras de n’importe qui. L’enfant sait bien qu’il dépend de l’amour d’un père et d’une mère. C’est la raison pour laquelle, il peut leur faire confiance. Quand Jésus s’abandonne sur la croix, il ne faut jamais oublier à qui il s’adresse. Le premier mot qu’il prononce, c’est bien celui de son Père : « Père, je remets mon esprit entre tes mains » Lc 23-46.

De même quand Charles de FOUCAULD laisse Jésus exprimer sur ses lèvres cette prière d’abandon, il commence par ce mot : « Mon Père » qu’il va répéter quatre fois. C’est en contemplant Jésus sur la croix que nous comprendrons que Dieu est Père avec un cœur de mère, et qu’il est un cœur paternellement maternel, comme dit St François de Sales.

Dans un premier temps, le mouvement d’abandon suppose de voir la réalité bien en face dans la lumière de Dieu. Il ne s’agit pas de se mettre la tête dans le sable comme l’autruche pour ne pas voir la réalité.

L’abandon commence souvent par la révolte, les larmes et le désarroi. Et dans un deuxième temps, il s’agit de l’assumer avec Dieu avant de le laisser peu à peu assumer par Dieu en nous-mêmes. Cette croix est tellement lourde qu’elle risque de nous écraser.

C’est là qu’il s’agit de l’offrir à Dieu pour laisser le Christ vainqueur des forces des ténèbres l’assumer avec nous. N’oublions pas que le Christ a assumé la mort de la croix.

Quand le ressuscité apparaît à ses disciples, ce n’est pas un beau jeune homme blond, aux yeux bleus et aux cheveux bouclés. Il porte la marque de ses blessures. Et pourtant, c’est de son cœur transpercé que jaillit la grâce divine. Oui, la déchirure demeure et l’absence est parfois lourde à certaines heures. Celles et ceux qui ont été victimes de la violence des êtres humains, arrivent difficilement à pardonner. Or, Jésus n’a pas dit à ses bourreaux, sur la croix : « Je vous pardonne », mais il a dit : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font ». Cette parole de Jésus est libératrice. Dans l’acte d’abandon, il s’agit de laisser Dieu pardonner à travers nous. Dans le mouvement d’abandon, il ne s’agit pas de fermer les yeux sur la misère morale ou les handicaps que nous avons à assumer. Toute notre vie humaine est composée d’ivraie et de bon grain.

            L’abandon suppose d’oser offrir à Dieu l’ivraie et le bon grain (c’est-à-dire nous-mêmes) car Dieu seul est capable de changer l’ivraie en bon grain. Alors nous découvrirons que Dieu a mis toute chose à sa vraie place avec un ordre qui n’appartient qu’à Lui. De là jaillit la source d’une profonde Paix et d’une Joie intérieure.

                         Méditons : 1Jean 10-13

             En ceci consiste l’amour :

            Ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu,

            Mais c’est Lui qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils

            En victime de propitiation pour nos péchés.

            Dieu, personne ne l’a jamais contemplé ;

            Si nous nous aimons les uns les autres,

            Dieu demeure en nous,

            En nous son amour est accompli.

            A ceci nous connaissons que nous demeurons en lui et lui en nous :

            Il nous a donné de son Esprit.

                       Noéline FOURNIER, Laïc.