Messe télévisée Le Jour du Seigneur
prévue pour le 11 octobre 2020 et annulée le 25 septembre 2020

La messe du 11 octobre a été célébrée à 9 H
en l’église Saint Camille de Lellis, paroisse de la Bretagne
et radioffusée sur « Arc-en-ciel » et facebook de la radio

 

 

 

REPONDRE A L’INVITATION AVEC « FRATELLI TUTTI »

Mot d’accueil et préparation pénitentielle

Chers frères et sœurs en Jésus-Christ,
Chers frères et sœurs en humanité,
Bonjour à vous tous en cette église Saint Camille de Lellis et à chacun de vous qui
priez avec nous grâce à Radio Arc-en-ciel et Facebook. Paix dans ton cœur de bien-
portant ou de malade. Paix dans les familles, paix dans le travail et les loisirs, paix
dans les hôpitaux et les prisons. N’ayons qu’un seul cœur et une seule âme. Aussi,
préparons-nous à la célébration de l’eucharistie en reconnaissant que nous sommes
pécheurs.

* * *

Homélie
(cf. Lc 22, 1 à 14)

Chers frères et sœurs en Jésus-Christ,
Chers frères et sœurs en humanité,

Dieu Notre Père, le Roi du Royaume d’amour, a un grand projet d’amour pour
l’humanité. Mais au début, au commencement, au commencement avant le
commencement, il n’y a pas d’humanité. Il n’y a que Dieu, rien d’autre que Lui, Lui
Amour et Lumière incréés crée tous les univers par l’expansion de son amour. Mais
que serait un amour qui n’aurait pas un autre amour qui lui réponde ? Dieu qui est
hors du temps se soumet au temps dans le rythme d’évolution de sa création. Il dit et
il fait. Il dit et c’est fait. Il prépare la terre comme un grand jardin d’harmonie et de
paix pour une maison commune. Une maison commune pour qui ? Le Livre des
origines, les deux grands poèmes de la Genèse nous donnent la réponse : « Dieu
créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme…
et vit que cela était très bon » (Gn 1,27).

Alors, qu’est-ce qui s’est passé ? Nous les humains, les hommes et les femmes,
nous sommes interdépendants les uns des autres. Dans le Bien comme dans le Mal.
Aujourd’hui, il nous est facile de comprendre qu’un acte posé en 2020 aura des
conséquences dramatiques en 2050 et bien après… surtout s’il s’agit de décisions
qui concernent la vie elle-même, la transmission de la vie et l’avenir de la planète.
Ainsi en est-il du péché des origines et de ses conséquences. Avec Adam et Eve,
avec les premiers hommes et les premières femmes et jusqu’à nous… la conscience
de l’humanité s’est déchirée. Elle est blessée. Nous pourrions la croire cassée mais
nous portons en nous la nostalgie d’un paradis perdu. L’aspiration au bonheur est là.

Alors, est-ce que Dieu n’est plus Dieu ? Est-ce qu’Il a fait fausse route dans son
grand projet d’amour pour l’humanité ? Non. C’est nous qui nous nous détournons du
chemin qui peut nous reconduire nous-mêmes à nous-mêmes, à Dieu Lui-même, à
nos frères et à nos sœurs de la grande famille humaine si riche de nos multiples
diversités ethnoculturelles. Sans cesse, Dieu intervient dans l’Histoire de l’humanité
par des alliances successives, afin de relancer encore, et encore, et toujours, son
grand projet d’amour, pour un royaume d’amour, pour le royaume des cieux.
Souvenez-vous, souvenons-nous : Noé, Abraham, Moïse, les patriarches, les
prophètes… et Jésus.

Jésus, qui est-il ? Il est le Verbe fait chair de la chair de Marie par la puissance de
l’Esprit-Saint. Aujourd’hui, Dieu le Père, le Roi du Royaume des cieux, fait tout exister
par son Verbe fait chair et rien ne pourrait exister sans Lui. Jésus – Verbe de vie
épouse donc la condition humaine. Jésus est amoureux de tous les hommes, de
toutes les femmes, de tous les temps. Jésus aime jusqu’au bout de l’amour, jusqu’au
bout de la croix, jusqu’à la gloire rayonnante de la résurrection. Et Jésus a voulu se
donner à nous en nourriture avec le fruit de la terre et du travail des hommes. « Ceci
est mon corps, ceci est mon sang ». Corps livré, sang versé dans la coupe de
l’alliance nouvelle et éternelle. Jésus, l’agneau immolé, efface le péché du monde :
« Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir mais dis seulement une parole et je
serai guéri ». A chaque messe, nous sommes invités à participer au festin des noces
de l’Agneau par le Roi, le Père qui se réjouit des épousailles de son Fils avec
l’humanité. C’est Lui le Père qui nous invite au festin. Alors, comment répondons-
nous concrètement à l’invitation de Dieu le Père qui nous invite à célébrer les noces
de son Fils avec l’humanité dans chaque liturgie dominicale ? Ne cherchons pas des
alibis… ou plutôt, dénichons-les pour les éliminer.

Pour une civilisation de l’amour et de la vie

« Ceci est mon corps, ceci est mon sang ». Dieu fait corps avec l’humanité qui est
appelée à s’intégrer à son Royaume. Et nous, chrétiens, par Jésus, avec Lui et en
Lui, nous sommes invités à relire les événements et à agir en conséquence pour
donner sens à notre vie. Donner sens à notre vie personnelle, familiale, collective,
culturelle, économique, politique. Pensons par exemple à ce que nous dit le pape
François dans sa dernière encyclique « Fratelli Tutti », Tous frères, au sujet de la
pandémie Covid-19 : « Nous nous sommes rappelés que personne ne se sauve tout
seul, qu’il n’est possible de se sauver qu’ensemble. C’est pourquoi j’ai affirmé que
« la tempête démasque notre vulnérabilité et révèle ces sécurités, fausses et
superflues, avec lesquelles nous avons construit nos agendas, nos projets, nos
habitudes et priorités (…) A la faveur de la tempête, est tombé le maquillage des
stéréotypes avec lequel nous cachions nos ego toujours préoccupés de leur image ;

et reste manifeste encore une fois cette heureuse appartenance commune à laquelle
nous ne pouvons pas nous soustraire : le fait d’être frères » (§ 32).

« Le fait d’être frères » dans une société donnée, c’est, nous dit le pape François,
« Faire partie d’un peuple, c’est faire partie d’une identité commune faite de liens
sociaux et culturels ». Et cela n’est pas quelque chose d’automatique, tout au
contraire : c’est un processus lent, difficile… vers un projet commun » (§ 132). A La
Réunion, comme en France, nous entrons dans une période de turbulences
électorales. J’estime qu’il nous faut tous méditer les paroles de sagesse de notre
pape : « En politique, il est aussi possible d’aimer avec tendresse. Qu’est-ce que la
tendresse ? C’est l’amour qui se fait proche et se concrétise. C’est un mouvement qui
part du cœur et arrive aux yeux, aux oreilles, aux mains. La tendresse est le chemin à
suivre par les femmes et les hommes les plus forts et les plus courageux. Dans
l’activité politique, les plus petits, les plus faibles, les plus pauvres doivent susciter
notre tendresse. Ils ont le droit de prendre possession de notre âme, de notre cœur.
Oui, ils sont nos frères et nous devons les traiter comme tels » (§ 192).

Cette réflexion du pape me fait penser aux plus petits, aux plus faibles, aux sans
défense que sont les fœtus et les bébés dans les seins maternels. Au moment où les
lois de bioéthique sont en révision et que, contrairement à une opinion publique
matraquée, la loi n’est pas encore votée, nous devons tous prendre en considération
les questions posées par le Conseil permanent de la Conférence des Evêques de
France. Voici ces questions :

‒ Une société peut-elle être fraternelle lorsqu’elle n’a rien de mieux à proposer
aux mères en difficulté que l’élimination de l’enfant qu’elles portent ?
‒ Une société peut-elle être fraternelle lorsqu’elle renonce à reconnaître le rôle
de la mère et du père,
‒ lorsqu’elle ne reconnaît plus que le lieu digne de l’engendrement d’un être
humain est l’union corporelle d’un homme et d’une femme qui ont choisi d’unir
leur vie pour créer un espace d’alliance et de paix au milieu de ce monde
magnifique et dangereux ?

Je ne doute pas de votre réponse à vous, chrétiens, catholiques. Je ne doute pas de
votre réponse à vous tous, citoyens de bons sens. Je ne doute pas de votre
engagement à respecter et à faire respecter la vie humaine depuis le sein maternel
jusqu’à la mort naturelle. Je compte aussi sur vous, vous nos sénateurs et nos
députés de La Réunion et de la Nation, pour défendre cette cause qui transcende les
partis politiques. Ne développons pas une culture de mort mais construisons les
conditions d’une civilisation de l’amour et de la vie.

Le pape François nous invite à concevoir et à réaliser une « bonne politique ». Il nous
dit : « La bonne politique unit l’amour, l’espérance, la confiance dans les réserves de
bien qui se trouvent dans le cœur du peuple en dépit de tout. C’est pourquoi la vie
politique authentique qui se fonde sur le droit et sur un dialogue loyal entre les
personnes se renouvelle avec la conviction que chaque femme, chaque homme et
chaque génération portent en eux une promesse qui peut libérer de nouvelles
énergies relationnelles, intellectuelles et spirituelles » (§ 196).

Et le pape François nous a dit précédemment « J’invite à l’Espérance qui nous parle
d’une réalité au plus profond de l’être humain, indépendamment des circonstances
concrètes et des conditionnements historiques dans lesquels il vit. L’Espérance nous
parle d’une soif, d’une aspiration, d’un désir de plénitude, de vie réussie, d’une
volonté de toucher ce qui est grand, ce qui remplit le cœur et élève l’esprit vers les
grandes choses, comme la vérité, la bonté et la beauté, la justice et l’amour.
L’Espérance est audace, elle sait regarder au-delà du confort personnel, des petites
sécurités et des compensations qui rétrécissent l’horizon, pour s’ouvrir à de grands
idéaux qui rendent la vie plus belle et plus digne (…) » (§ 55).

Que Dieu nous donne la joie de l’Evangile. Qu’avec l’aide de Dieu, disparaissent les
larmes de tous les visages pour que le désespoir cède la place à l’espérance, que
l’enfermement cède la place à l’ouverture aux autres, que nos égoïsmes cèdent la
place à la générosité et à la solidarité. Ainsi se réalisera pour nous ce que nous
chantons avec le psaume 84 : « Amour et vérité se rencontrent. Justice et paix
s’embrassent » tous les jours de notre vie, pour la durée de nos jours, pour les
siècles des siècles. Amen.

Monseigneur Gilbert AUBRY