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La parole de Dieu
« Voici votre Dieu : c’est la vengeance qui vient, la revanche de Dieu. Il vient lui-même et va vous sauver. » Isaïe 35, 4c
La méditation
Il y a bien longtemps que le roi David « s’est couché avec ses pères ». Il y a bien longtemps que le peuple juif attend un messie qui serait de sa descendance. Un roi qui, comme lui, prendrait les armes contre les ennemis d’Israël. Et voilà que le prophète Isaïe leur annonce cette chose inouïe : ce n’est pas un simple humain, c’est Dieu lui-même qui vient les sauver ! Ses prérogatives seront celles d’un vrai roi qui libèrera les captifs, défendra le pauvre et l’opprimé contre la main des puissants. Le prophète les invite à la joie car l’action salvifique de Dieu a déjà commencé par l’affaiblissement de Babylone. Libéré des chaînes de la peur et de l’abattement extrême, le peuple peut laisser surgir l’espérance et le courage car son salut est proche. C’est un nouvel exode qui l’attend. Pour revivre pleinement la joie de la communion avec Dieu.
S’il est vrai qu’Isaïe parlait littéralement du retour du peuple à Jérusalem, son annonce dépassait un simple fait extérieur : ses paroles évoquaient déjà le salut qu’allait opérer le Messie, le retour dans l’intimité de Dieu. C’est pour cette venue que le prophète a invité les siens à « préparer le chemin », à « aplanir la route » pour Dieu (Is 40, 3-4). C’est ce que Jean Baptiste fera en proclamant un baptême de conversion. Cette intimité avec Dieu se concrétisera en Jésus, Dieu fait homme, « Immânû’él » « Emmanuel », Dieu-avec-nous.
Mais plus de mille ans après la disparition de David, comme on est bien loin de ce messie annoncé par Jean qui « casserait la baraque », qui surviendrait avec éclat, comme celui qui « tient à la main la pelle à vanner », comme celui qui « nettoiera son aire. » (Mt 3, 12). Un messie qui viendrait avec force, juge redoutable, une sorte de « chevalier blanc » qui bouterait hors de la Palestine l’orgueilleux occupant romain. Un messie qui le délivrerait aussi de sa prison. Voilà Jean déconcerté, lui qui avait présenté à deux de ses disciples Jésus comme « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde. » (Jn 1, 29). Ne s’est-il pas trompé en constatant cette résilience avec la représentation qu’il se faisait du Messie ? N’a-t-il pas compris en effet que la prédication et les œuvres de Jésus sont d’une toute autre nature ? Le Fils de l’homme n’est pas venu imposer un royaume par la force, une libération politique du peuple. Mais il est venu révéler la splendeur de Dieu, son amour gratuit et sa miséricorde. Il parle certes avec autorité, mais il agit avec douceur, respectant chaque personne. Il accueille les pécheurs sans leur imposer d’exigences. Il libère les petits de leur servitude et restaure leur dignité.
Aussi à la question que lui posent les deux envoyés du Baptiste dans le texte évangélique de ce dimanche, « Es-tu le Messie qui doit venir ? » (Mt 11, 3), Jésus ne répond pas directement. De sa bouche jaillissent plutôt les paroles d’Isaïe, laissant entendre qu’il est celui qui doit venir, mais porteur d’un messianisme au profit des pauvres et des nécessiteux. C’est également une invitation lancée à Jean à ouvrir les yeux, à quitter la « geôle » de ses doutes, à entrer dans la réalité de la Révélation. Jésus lui-même, son message et ses gestes indiquent ce changement martelé par les prophètes depuis la nuit des temps : la naissance d’un monde nouveau, la naissance d’une humanité nouvelle.
N’est-ce pas là surtout une invitation qui s’adresse à nous qui sommes souvent déçus de Dieu qui semble ne pas répondre à nos désirs ou agir comme nous le voudrions ? Désenchantés en apparence que rien n’a changé depuis 2000 ans ? J’entends certains clamer que défendre la cause d’un Dieu qui « ne suit pas nos plans » n’est pas facile, mais c’est la preuve décisive de notre foi. Nous devons être prêts à accueillir un Dieu « distinct », un Dieu qui détruit nos idoles modernes. Ne voyons-nous pas les signes de sa présence : partout où il y a de l’amour, le règne de Dieu est commencé ? Ne soyons pas uniquement obnubilés par la charrette de malheurs que déversent chaque jour les médias. Voyons aussi tous les petits gestes concrets d’amour, de justice, de miséricorde, de paix qui fleurissent autour de nous.
Que ce temps de l’Avent, où nous attendons le retour du Seigneur, nous éloigne de notre respectable confort. Il nous veut en mode veille active car il a besoin de chacun de nous. A notre tour de révéler sa splendeur et sa présence. Cette image adéquate, authentique de Jésus. Soyons ses mains, son regard, sa tendresse. Le Christ Jésus a été lumière pour Jean Baptiste quand il croupissait en prison. Que, par nous, sa lumière brille encore et toujours pour nos frères et sœurs souffrants ou enfermés, abandonnés ou non considérés. Dans ce combat de longue haleine, au sein de notre Église communauté d’amour et bonne nouvelle, prenons résolument, comme nous y invite saint Jacques, « pour modèles d’endurance et de patience les prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur. » (Jc 5, 10).
Pour aller plus loin avec la parole
« Celui qui répond par des bienfaits pense à l’avenir, s’il vient à chanceler, il trouvera un soutien. » Si 3, 31
Diacre Jean-Marie Armand – Avent 2016 – Dimanche 11 décembre 2016 pour Jevismafoi/Sedifop