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Dans le mystère que nous célébrons aujourd’hui, dans l’Evangile de l’Annonciation, il nous est donné de contempler une facette étonnante de la Révélation chrétienne. Un aspect si surprenant que s’il n’était pas affirmé par la Bible, nous n’aurions jamais pu le découvrir par nous mêmes. Je veux parler de l’incroyable délicatesse de Dieu.

Il est assez facile, ou plutôt assez logique, de croire que Dieu est Tout-Puissant. Un Dieu qui ne peut pas faire ce qu’il veut, ce ne serait plus vraiment un Dieu. De même, il est logique de croire que Dieu est parfaitement heureux en Lui-même, qu’il n’y aucune division ni conflit entre les Personnes de la Trinité, bref que tout en étant Trinité, Dieu est parfaitement Un. Nous ne cherchons peut être pas beaucoup à approfondir ces beaux mystères, mais en tout cas, nous les tenons sans trop de difficulté.  Or, qu’avons-nous vu aujourd’hui quand nous avons vu cette Toute-Puissance divine à l’œuvre dans l’Evangile que nous venons d’entendre ? Comment avons-nous vu le Tout-Puissant s’adresser à la Vierge Marie ? Avec une incroyable délicatesse ! 

Enfin quand même, l’enjeu est de taille ! Il ne s’agit de rien de moins que de sauver toute l’humanité, de rattraper le drame de la chute originelle. Tous les hommes, mystérieusement mais hélas bien réellement,  tous les hommes sont tombés avec Adam et Eve. Tous se sont coupés de la communion originelle à la vie divine. L’humanité s’est coupée de Dieu. Elle ne sait plus où est Dieu, elle le cherche dans des idoles ou des mirages. Elle se construit des faux dieux, elle écoute de faux prophètes, elle s’enivre dans de faux bonheurs. La situation est vraiment dramatique ! Et que fait le Dieu Tout-Puissant pour répondre à ce malheur ?

Nous venons de l’entendre, frères et sœurs, pour accomplir une tâche si immense. Dieu n’envoie pas des myriades d’anges et de chérubins rétablir sa justice, Il ne fait pas éclater sa gloire aux milieux des nations en terrassant les rois et les puissants par la force. Non ! Dieu envoie un ange à une jeune fille craintive, et il lui annonce qu’elle est enceinte, qu’elle ne doit pas s’inquiéter, qu’elle porte en son sein le salut du monde. Dieu envoie un ange à une jeune fille vierge pour lui annoncer qu’elle porte en ses entrailles un fils qui est aussi son sauveur, un bébé qui est aussi son créateur, un fils d’homme qui est aussi le Fils Eternel du Père, le Verbe de Dieu, la lumière née de la lumière, le vrai Dieu né du vrai Dieu.

Oui, quand Dieu agit avec les hommes, il le fait toujours d’une manière merveilleusement délicate, et la Vierge Marie en est la plus belle illustration. Quand la toute-puissance de Dieu réalise avec l’Incarnation du Fils la tâche la plus importante que l’histoire des hommes ne verra jamais, elle le fait de manière délicate, avec la collaboration d’une jeune fille humble et pure. Nous le voyons, l’action de Dieu n’est pas tapageuse, elle ne se vante pas, ne se gonfle pas d’orgueil, ne cherche pas son intérêt, mais elle prend patience, elle croit tout, espère tout, supporte tout. L’action de Dieu nous la voyons en Marie à l’état pur, si j’ose dire. Quand on contemple la Vierge Marie, on voit Dieu qui agit sans interférence, sans qu’aucun péché n’y fasse obstacle. On le voit dans l’Evangile, on l’a vu à Lourdes.

Tous ceux qui connaissent les événements de Lourdes peuvent voir cela dans l’attitude de la Vierge Marie à l’égard de Bernadette. Ici aussi les contrastes sont frappants. Que dit la Très Sainte Mère de Dieu à cette petite bergère du fin fond des Pyrénées ? « Voulez-vous me faire la grâce de venir ici pendant quinze jours ? » La Reine du ciel vouvoie la pauvrette de Lourdes. Elle  lui demande la grâce de venir la voir ! Et, la délicatesse de Marie à Lourdes, n’est que la conséquence de la tout aussi incroyable délicatesse avec laquelle Dieu a agit avec elle à Nazareth. Oui, quand on contemple la Vierge Marie, on voit Dieu qui agit sans interférence.

Et que voit-on, plus précisément, dans l’Evangile d’aujourd’hui ? Nous voyons d’abord que cela n’enlève pas une certaine crainte ni une certaine incompréhension de la part de la Vierge Marie. Nous l’avons entendu, la jeune fille est un peu apeuré quand elle accueille l’ange, et ensuite, elle est un peu étonnée, elle lui demande comment cela va-t-il se faire quand il lui annonce sa grossesse. Mais finalement, cette crainte et cette incompréhension premières s’achèvent dans une humble obéissance : « que tout se fasse selon ta parole. »

Alors n’allons pas attendre que Dieu nous traite autrement qu’il n’a traité sa propre mère ! Ne lui demandons pas d’agir avec nous différemment. Ne Lui demandons pas d’agir en nos cœurs avec fracas, de s’imposer à nous sans notre consentement, d’agir sans délicatesse. Et n’ayons pas honte, non plus, d’être parfois apeurés ou de ne pas tout comprendre, n’ayons pas honte de ne pas deviner les desseins mystérieux du Seigneur, n’ayons pas honte de rester interdit face à la souffrance ! Mais ne nous arrêtons pas en chemin, allons jusqu’au bout de la route avec la Vierge Marie et renouvelons notre confiance en Dieu, redisons Lui que notre vie Lui appartient, qu’Il peut faire de nous tout ce qu’Il veut car nous sommes à Lui et même si nous ne comprenons pas tout, même si nous avons parfois un peu peur de ce qu’Il pourrait nous arriver ; dans le fond, nous L’aimons ! dans le fond nous Lui faisons confiance ! dans le fond nous disons avec Marie : « Je suis le pauvre serviteur, je suis l’humble servante du Seigneur que tout m’advienne selon ta parole». Amen !

Méditations Carême 2019 – Lundi 25 mars 2019 – Fr. Clément Binachon O.P.

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