Prédication disponible en format audio.
« Ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, c’est Lui qui nous a aimés, et Il a envoyé son Fils qui est la victime offerte pour nos péchés. » Cette pensée de St Jean lue à la messe de ce jour est souvent connue. Elle nous fait demeurer dans la douce lumière de Noël et de l’Epiphanie, dans la surabondance de l’amour de Dieu pour nous, à l’image des paniers remplies qui restent après que Jésus a rassasié la foule par la multiplication des pains dans l’évangile d’aujourd’hui (Mc 6, 34-44). Dieu fait chair se donne voir, à entendre et à manger par la nourriture de l’eucharistie. Nous faisons mille calculs dans nos vies, et Dieu ne calcule jamais son amour. Ainsi, nous sommes tous ses enfants bien-aimés. Ne cessons pas de rendre grâce à Dieu pour son amour infini lorsque nous le contemplons dans la crèche !
En ce début d’année, nous pouvons parfois avoir l’impression que nous sommes pris en étau entre le marteau et l’enclume, entre le bien et le mal. Nous sommes parfois travaillés par la pensée inconsciente que Dieu est certes à nos cotés, mais que le mal peut être plus fort que lui en raison de certains événements politiques et personnels. Deux forces opposées qui s’affrontent, la victoire basculant tantôt dans un camp, tantôt dans l’autre. Cette opinion s’appelle le manichéisme, elle se révèle incompatible avec la foi et rejoint plutôt l’esprit des films Star Wars. Reprenons le fondement de notre foi : « Ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, c’est lui qui nous a aimés, et il a envoyé son Fils qui est la victime offerte pour nos péchés. » Dieu n’est pas une force. Son nom, Emmanuel, signifie : Dieu avec nous, qui s’engage ainsi personnellement auprès de nous depuis la première fête de Noël, Lui le créateur du ciel et de la terre. Jésus a été plus fort que la mort à Pâques, le pire des maux, alors il nous fait partager sa victoire et le mal ne peut pas nous dominer : « Où est-elle, ô mort, ta victoire ? … Grâces soient à Dieu qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus Christ » (1 Co 15, 54.57).
Comment trouver et s’abandonner au vrai Dieu ? En cette période de Noël, la méthode de Ste Thérèse de Lisieux peut nous aider. C’est sa « petite voie » qu’elle formule ainsi : « Jésus ne demande pas de grandes actions, mais seulement l’abandon et la reconnaissance. » C’est la voie de l’enfance spirituelle. « Si quelqu’un est tout petit, qu’il vienne à moi » (Pr 9, 4). « Si vous ne devenez pas comme les enfants, vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux » (Mt 18, 3). Il ne s’agit pas de se tomber dans des enfantillages ou d’être capricieux à souhait, mais de « s’abandonner sans cesse dans les bras de Jésus » (Ste Thérèse de Lisieux) : espérer son soutien ; ne pas être obsédé par les défauts des autres mais admirer leurs qualités ; ne pas vouloir tout faire avec mes seuls efforts et demander l’inspiration divine ; ne pas penser aux seules peurs qui paralysent, ne pas rechercher ce qui brille, mais se réfugier dans les bras du Père ; ne pas se décourager et découvrir qu’on est
aimé par Lui.
Dans cette pédagogie de l’enfance spirituelle, je reconnais sans cesse ma petitesse comme l’enfant qui a besoin de ses parents. Alors, ma confiance en Dieu devient plus ferme parce qu’elle repose sur son amour indéfectible. Même s’il se sent impuissant, l’enfant sait que son parent sera là pour l’aider. Thérèse de Lisieux nous montre que la vraie croissance commence là où la miséricorde divine dévoile notre pauvreté pour nous mener vers un chemin de confiance. Celui-ci passe nécessairement par un combat spirituel, par une purification de nos manières de voir et d’agir. Il s’agira de mourir à une partie de nous même.
Georges Bernanos fait ainsi dire à l’une des religieuses dans son Dialogue des carmélites :
« Une fois sortie de l’enfance, il faut très longtemps souffrir pour y rentrer, comme tout au bout de la nuit, on retrouve une autre aurore. Suis-je redevenue une enfant ? » (cf. revue FC, « La voie bénie de l’enfance spirituelle », n° 1979, pp. 10-16).
Père Pascal CHANE TENG. – Temps de l’Avent 2015
Transcription audio : Erick BERNON