Prédication disponible en format audio.

Qui dit jugement et procès pense naturellement aux magistrats et aux Palais de justice. En réalité, les personnes détenues sont jugées à de multiples reprises par des personnes différentes. À l’intérieur de la personne il y a le jugement de la conscience et la voix de Dieu si l’on est croyant. Dans l’entourage, la famille se sent menacée, atteinte, souvent déshonorée. Le jugement de la famille compte beaucoup pour le détenu qui peut se sentir soit abandonné soit soutenu. Parfois la police dépasse, lors de l’arrestation,  son domaine en parlant par avance des peines qui vont tomber sur la personne arrêtée. En prison, les codétenus peuvent aussi juger  sévèrement leurs camarades surtout quand il s’agit de violeurs ou de meurtriers d’enfants.

Par leur présentation objective ou orientée des délits en cause, les médias influencent l’opinion publique et le jugement futur. Pourtant, les prévenus sont présumés innocents tant qu’ils ne sont pas condamnés. L’administration pénitentiaire elle-même veille à ne pas mettre ensemble prévenus et condamnés.

Les codes de déontologie du journalisme demandent aux journalistes de ne pas signaler dans leurs articles sur les délits l’origine ethnique, la religion ou la nationalité des prévenus si cela ne s’avère pas indispensable pour la transmission de l’information.

Il est évident que le fait de relier un crime à une nationalité, à une origine ethnique ou à une religion provoque des pensées négatives envers l’ensemble des populations concernées.

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À La Réunion, il y a beaucoup de moyens de communication par rapport au nombre d’habitants, loin encore du million. Il n’est pas aisé de vendre les journaux, et de se faire écouter ou regarder. Les agences de presse et les médias nationaux et internationaux fournissent une bonne part des nouvelles à transmettre. Que reste-t-il sur le plan local ? Les crimes attirent le public, c’est-à-dire les acheteurs. Plus la présentation du crime met en exergue perversions et tragédies humaines et plus les consommateurs se tournent vers ces articles et reportages. D’où la tentation d’adopter une démarche morbide et quelques fois partiale et partielle dans le traitement de l’information dans un but  essentiellement financier. Le risque est grand de se servir du principe de justice pour profiter économiquement des scandales et des fautes souvent commises par des personnes fragilisées par un contexte familial et social dégradé. Au risque de paraître simpliste et de sembler excuser facilement des actes graves, l’expérience de prêtre et d’aumônier de prison attire l’attention du public sur les mauvaises conditions de vie des délinquants depuis leur enfance. Il serait inhumain de ne pas en tenir compte.

Dieu, riche en miséricorde, a rendu l’humanité juste par sa Passion, par sa Croix, par son pardon et par sa Résurrection.

Le droit est façonné par la Bible et la doctrine sociale de l’Église depuis vingt siècles. L’Église partage et promeut les principes essentiels de l’éthique du journalisme : « Charte de déontologie du journalisme de Luxembourg. Art. 5 :  a) La presse s’engage à éviter et à opposer toute discrimination pour des raisons de sexe, de race, de nationalité, de langue, de religion, d’idéologie, d’ethnie, de culture, de classe ou de convictions, tout en assurant le respect des droits fondamentaux de la personne humaine. e) La presse s’engage à respecter la présomption d’innocence et évite de présenter publiquement une personne comme coupable de faits avant toute confirmation officielle »[1] ; Charte de déontologie du journalisme de Suisse. 7.6 : « Mention des noms. En application de cette dernière disposition, le / la journaliste ne publiera en principe pas le nom ni tout autre élément permettant d’établir l’identité d’une personne mêlée à une affaire judiciaire, de manière à ce que cette personne ne puisse être identifiée hors de son cercle familial, social ou professionnel, informé indépendamment des médias »[2] ; Charte d’éthique des professionnels du journalisme en France. Syndicat national des journalistes : « Le journaliste ne confond pas son rôle avec celui du policier ou du juge »[3].

Pour parvenir à la miséricorde divine, il convient de partir de la justice humaine, en l’occurrence de l’éthique de l’information[4] que l’Église met en lumière.

Fr. Manuel Rivero O.P. – Chemin de Carème

Transcription audio : Manuel Rivero

  

[1] http://www.journalisme.com/documentation/la-doc/27-chartes-et-dontologie

[2]  http://www.journalisme.com/documentation/la-doc/27-chartes-et-dontologie

[3]  http://www.journalisme.com/documentation/la-doc/27-chartes-et-dontologie

[4] CONSEIL PONTIFICAL POUR LES COMMUNICATIONS SOCIALES. ETHIQUE DANS LES
COMMUNICATIONS SOCIALES. 4 juin 2000. htttp://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/pccs/documents/rc_pc_pccs_doc_20000530_ethics-communications_fr.html