Que célébrons-nous à Noël ? À quoi pensons-nous ? Où cherchons-nous la joie en ces jours de fête ?

Les pétards, la course à la consommation, le volume de la musique et les danses ne renvoient pas au mystère de la naissance de Jésus à Bethléem dans le silence et la pauvreté.

Pourtant l’histoire du monde converge vers une femme juive, Marie, qui par sa foi va accueillir le Fils de Dieu d’abord dans son âme par la foi et ensuite dans son sein maternel par l’action de l’Esprit Saint.

Les évangélistes ne nous rapportent pas de paroles de Marie et ni de Joseph lors de la naissance du Messie à Bethléem, la ville du roi David, ancêtre de Joseph, le père adoptif de Jésus. L’Évangile et la liturgie nous introduisent dans le mystère de l’Incarnation : le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous.

Dans la nuit étoilée de Noël, Marie et Joseph prennent soin de l’Enfant Jésus, qui porte en lui un grand mystère. La connaissance et la sainteté de Dieu sont cachés sous le voile de sa chair d’enfant.

Marie et Jospeh se prosternent devant leur enfant Jésus. Poussés par l’Esprit Saint, ils adorent cet enfant qui vient de plus loin qu’eux. Il vient de Dieu qui l’a envoyé pour sauver les hommes. D’ailleurs, Jésus veut dire en hébreu précisément cela : « Dieu sauve ».

Le Fils de Dieu naît dans une crèche afin de naître dans la crèche de notre cœur. Une étable n’est jamais très propre ni très bien éclairée, mais le Fils de Dieu n’a pas refusé d’y naître. Notre âme n’est pas très propre ni illuminée et pourtant Jésus veut y naître par notre foi.

Saint Thomas d’Aquin (†1274), lors d’une prédication sur la Nativité du Seigneur, annonçait la triple naissance du Fils de Dieu : « Triple est sa naissance : éternelle au sein du Père ; dans le temps, du sein de sa mère ; spirituelle en nos cœurs [1]».

Le Fils Unique-Engendré que personne n’a jamais vu[2] est né à Bethléem de la Vierge Marie et du Saint-Esprit afin de naître dans notre âme par la foi. Il s’agit d’une naissance spirituelle dans l’âme par l’action de l’Esprit Saint. Par la foi, ceux qui accueillent le Verbe fait chair reçoivent « le pouvoir de devenir enfants de Dieu[3] ».

Les trois messes de Noël

Dans la Somme théologique, saint Thomas d’Aquin relie de manière symbolique les trois messes de Noël aux trois naissances du Fils de Dieu : sa naissance dans l’éternité du sein du Père ; sa naissance spirituelle dans l’âme et sa naissance corporelle à Noël : « Au jour de la Nativité, on célèbre plusieurs messes à cause de la triple naissance du Christ.

La première est éternelle qui, pour nous, est cachée. C’est pourquoi l’on chante une messe la nuit, où l’on dit à l’introduction: « Le Seigneur m’a dit : tu es mon Fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré » (Psaume 2, 7). 

La deuxième est sa naissance selon le temps, mais dans les âmes, par laquelle le Christ « se lève dans nos cœurs comme l’étoile du matin » (2 P 1, 19). Et c’est pourquoi l’on chante une messe à l’aurore, où l’on dit à l’introduction : « La lumière brillera aujourd’hui sur nous » (Is 9, 2).

La troisième est la naissance du Christ selon le temps et dans son corps, selon laquelle il s’est produit visiblement hors du sein virginal, revêtu de notre chair. Et c’est pourquoi, on chante la troisième messe à la pleine lumière et l’on chante dans son introït: « Un enfant nous est né » (Is 9, 5)[4]».

Notre âme s’appelle « Marie »

C’est ainsi que l’âme, par la foi, peut devenir mère du Christ et elle reçoit le nom de la mère de Jésus « Marie ». Saint Ambroise de Milan (†397) enseigne ce mystère : « Lorsque cette âme commence à se convertir au Christ, elle s’appelle « Marie » : c’est-à-dire qu’elle reçoit le nom de celle qui a mis au monde le Christ ; elle est devenue une âme qui engendre le Christ de manière spirituelle[5] ». Le chrétien devient mère du Seigneur. Le Christ Jésus va grandir en lui à l’image du bébé porté par la mère dans son sein et qui se développe de jour en jour, jour et nuit. Il s’agit d’accueillir le Christ Jésus comme Marie l’a fait à l’Annonciation. Selon la chair, il n’y a qu’une maternité divine, celle de Marie, « mais selon la foi, le Christ est le fruit de tous[6] ».

Aujourd’hui soyons dans la joie ! Le Fils de Dieu qui est né de Marie vient naître aussi dans notre âme. Imitons la foi de la Vierge Marie qui est la foi de l’Église. Adorons l’Enfant Jésus et chantons le « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime ».

 

[1] Saint Thomas d’Aquin, Sermo in Nativitaté Domini, Éditions Vivès, t. XXIX, p.287 : « Triplex est ejus nativitas, aeternalis ex Patre, temporalis ex matre, spiritualis ex corde. »

[2] Cf. Évangile selon saint Jean 1, 18 : « Nul n’a jamais vu Dieu ; le Fils Unique-Engendré, qui est dans le sein du Père, lui, l’a fait connaître ».

[3] Prologue de l’Évangile selon saint Jean 1, 12.

[4] Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique. III. Question 83, réponse à l’objection 2, Solutions 2.

 

[5] Saint Ambroise de Milan, Sur la Virginité, IV, 20 (P.L. XVI, 271 B).

[6] Saint Ambroise de Milan, Traité sur l’Évangile de Luc, II, 26, édition « Sources chrétiennes », tome I, p. 84.

 

Méditation du Vendredi 25 décembre 2020 – Fr Manuel RIVERO O.P.

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