Prédication disponible en format audio.
Nombreux sont ceux qui avouent leur souffrance de ne jamais avoir pu s’adresser à un homme en disant « papa ». Leur maman a toujours fait office de mère et de père, de femme et d’homme, assumant les rôles de l’un et de l’autre dans la tendresse et la sévérité.
Il arrive que la mère refuse de révéler à son enfant qui est son père, ce qui accroît son angoisse et sa soif de connaître son origine. Parfois, le père refuse de rencontrer son enfant ou encore sa mère le lui interdit. À d’autres occasions, pour cause d’infidélité, de violence ou d’alcool, la mère va jusqu’à dire à son enfant : « Les hommes, nous n’en avons pas besoin ».
Très souvent, le père a quitté la maison familiale alors que l’enfant n’avait que 4 ou 6 ans, laissant celui-ci dans un grand désarroi. L’enfant ne comprend pas toujours ce départ brutal ; il demande à sa mère « pourquoi papa est-il parti ? « quand va-t-il revenir ? » Il garde dans sa mémoire les derniers mots et les derniers gestes de son père passant la porte de la maison. Geste d’au-revoir devenu parfois signe d’un adieu qui plonge l’enfant dans la solitude et le sentiment d’abandon.
Souvent ces orphelins cherchent l’image paternelle dans d’autres hommes : un oncle, un ami de la famille, un professeur, un prêtre, le parrain du baptême …
Le rôle de père n’est pas aisé, et il n’est pas à la mode. Ce qui est dans l’air du temps ressemble à l’insouciance et à l’irresponsabilité de l’adolescent : s’amuser, impressionner les autres, enfreindre les interdits, se révolter contre tout …
Tout enfant ressent profondément le besoin d’avancer dans la vie « sur deux jambes » : son père et sa mère. Leurs missions sont différentes et complémentaires au service du développement de l’enfant.
La théorie du genre qui se présente comme un progrès risque fort d’accentuer la douleur de l’enfant en manque de modèle paternel ou maternel.
Image de la Trinité où trois Personnes différentes -le Père, le Fils et l’Esprit-Saint- ne font qu’un dans l’amour réciproque, l’enfant a besoin de son père et de sa mère, différents, d’égale dignité, appelés à s’unir dans l’amour fécond et rayonnant.
La relation de l’enfant à son père n’est pas celle qui le relie à sa mère. Celle-ci l’a porté dans son corps pendant neuf mois, gardant un contact physique très étroit pendant sa vie de nourrisson.
Habituellement le père renvoie à la loi. Il fait sortir l’enfant de la relation fusionnelle à sa mère pour l’initier à l’action et à la vie professionnelle et publique. Aujourd’hui cette distinction des rôles est beaucoup moins tranchée que par le passé à cause de la participation accrue des femmes à la vie professionnelle et publique.
Depuis que les métiers de l’enseignement, de la santé, du journalisme et de la politique sont assumés en grande partie par des femmes, l’enfant a en face de lui plus de modèles féminins que masculins. C’est la voix de la femme qu’il entend à longueur des journées alors qu’il éprouve le besoin de se confronter à l’homme adulte, à sa voix et à son autorité. Dans les arts martiaux, nombreux sont les enfants qui se plaisent à subir la discipline de leurs maîtres masculins. Pour grandir, l’enfant a besoin de la relation maternelle et paternelle.
En cette période de Noël et d’Épiphanie, la liturgie nous montre l’Enfant-Jésus, protégé par sa mère et par son père. La Sainte Famille de Bethléem et de Nazareth est un modèle pour les familles de tous les temps.
Jésus a prié « Abba (Père) ! » (Mc 14, 36). « Abba » est un mot araméen qui veut dire « papa ». Dans l’épreuve de Gethsémani, la veille de sa Passion, Jésus a prié en union intime avec son Père. Nul homme n’avait osé appeler Dieu « papa » dans l’Ancien Testament. Fils de Dieu, tourné vers son Père, Jésus prie et Il nous introduit dans sa propre prière : « Abba (Père) ! ». Prier, ce n’est pas réciter des prières mais entrer dans la prière filiale de Jésus par l’Esprit Saint répandu dans nos cœurs (Ga 4, 6-7 ; Rm 8, 15).
Prions pour que les nouvelles générations ne soient pas des générations sans « père », sans père à la maison, sans père spirituel, sans père dans la nation.
Le chrétien n’est pas orphelin. Dans les eaux du baptême, il est devenu « fils du Père » en communion avec Jésus et le Père l’aime avec tendresse et fidélité comme Il aime son Fils unique.
Tout enfant peut dire alors « papa » s’adressant à Dieu le Père, source de toute paternité.
Aussi peut-il prier dans l’Esprit de Jésus ressuscité: « Abba (Père) ! »
Fr. Manuel Rivero O.P.
Vendredi 6 Janvier 2017
merci,magnifique.