Prédication disponible en format audio.
Le titre de notre méditation provient de la liturgie de l’abbaye de Sylvanès, dans Aveyron. Ce répertoire a été créé par les pères Gouze, Revel et Bourgeois. Le Christ, vainqueur du diable : tel est le thème de l’évangile du jour, où notre Seigneur accomplit un exorcisme pour guérir un homme muet et il explique son geste face à certains de ses ennemis. Ce miracle rejoint le combat spirituel que nous avons à mener, par exemple en ce temps de carême : lutter d’abord contre notre moi dominateur ; lutter contre le mensonge, tactique adulée par le diable qualifié de ‘père du mensonge’. C’est la stratégie qu’il adopte pour piéger Adam et Eve en leur faisant croire qu’ils deviendront puissants comme Dieu s’ils croquent le fruit défendu. Si nous voulons évoquer le combat contre l’Ennemi et le Christ victorieux du mal, commençons par une première conviction fondamentale révélée par Dieu lui-même, pour nous rassurer et nous éclairer : notre monde est beau et l’homme une magnifique créature de Dieu (Gen 1). Tel est le désir de Dieu : marquer notre création de son empreinte, ne pas laisser croire que nous sommes d’abord infestés par le mal. La Réunion est si belle que certains touristes fuient ainsi le froid pour venir se reposer chez nous. D’autre part, Dieu a désiré habiter notre histoire et notre chair à Noël : ces dernières sont donc devenues le lieu choisi par Dieu pour nous sauver. Il réside en personne dans notre humanité, Emmanuel, Dieu avec nous : telle est la conviction avant d’évoquer le Malin.
Ensuite, existe bien sûr le combat contre le mal : il commence dès l’enfance car le cœur de nos jeunes sont aussi exposés à cette lutte, petite, mais réelle. D’où l’importance de les habituer à l’amitié avec Dieu pour leur donner sa force et sa lumière. Et cette amitié se donne de manière particulière dans la messe, canal par où passent la force et l’amour de Dieu.
Pour nous adultes, l’apprentissage de ce combat peut d’abord commencer par la maîtrise de la bouche, contre l’ironie, le mensonge et l’insulte. Ce n’est pas de la morale, c’est une leçon qui est donnée par la Parole même de Dieu dans le chapitre 3 de la Genèse. Lorsque le serpent veut détruire la relation entre Adam, Eve et Dieu, il utilise la moquerie et le mensonge en promettant que le fruit défendu leur donnera gloire et puissance, tout en traitant Dieu de menteur. Voilà pourquoi Satan est traité de « père du mensonge ». Par conséquent, dire du mal à répétition des autres, de manière ironique, représente un piège que nous tend le diable. Une première solution est de fermer sa bouche tout simplement !
Ensuite, le Malin utilise la fatigue pour nous déstabiliser. Cet exemple est fourni par le père jésuite Bernard Sesboüé dans son fameux livre « Croire », éd. Droguet et Ardant, pp. 401-402. Il raconte. Imaginez que vous rentrez d’une excellente journée avec des amis. De retour chez vous, vous vous sentez tout d’un coup triste, vide, alors que la journée s’est déroulée dans la joie. Il s’agit alors de s’analyser et d’être attentif à sa « météo intérieure ». Dans un premier, temps, je constate que je suis triste, dans le brouillard. Dans un deuxième temps, je relis ma journée et je remarque que mon attitude avec mes amis a été naturelle, c’est à dire développer une bonne amitié et une communion, bref semer de la joie. Alors, le vide et le flou que je peux ressentir en fin de journée résulte de la fatigue normale d’une journée d’activité dans une phase de décompression après un moment fort. Le remède est simple : aller dormir tout de suite. Car le diable peut profiter de cette fatigue pour me plonger dans des idées noires suite à mon bon comportement. Il ne faut pas prendre au sérieux cette tristesse, sinon elle me fait du mal. Il faut aller me reposer. Demain, tout sera lavé et libéré !
En revanche, en analysant mon attitude de la journée, je note que j’ai cherché à me mettre un peu trop en valeur, que j’ai été provocant, souvent ironique. Inconsciemment, j’ai cherché à montrer ma supériorité. Si c’est le cas, alors cette tristesse est un signal d’alerte positif de Dieu allumé dans ma conscience pour montrer que je ne suis pas dans le bon chemin, pour retrouver un équilibre intérieur et l’amitié de Dieu .
Oui : Il est vaincu le Prince de ce monde, gloire au Christ vainqueur qui nous a sauvés !
Jésus, donne-nous la foi de croire en ta victoire et en la puissance de ta résurrection.
Père Pacsal CHANE TENG
Chemin de Carême, Jeudi 12 Mars 2015