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L’Evangile de ce jour commence par ces lignes : « En ce temps-là, l’un des Douze, nommé Judas Iscariote, se rendit chez les grands prêtres et leur dit : « Que voulez-vous me donner, si je vous le livre ? » Ils lui remirent trente pièces d’argent », le prix, à l’époque, d’un esclave…

Et voilà que par ce biais, nous pressentons que Jésus, le Fils Unique et Eternel de Dieu, Lui, le Seigneur infiniment Libre et Souverain, prend la place de l’esclave… « Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition d’esclave » (Ph 2,6-7)… En effet, « Dieu l’a pour nous identifié au péché » (2Co 5,21), au sens où il a pris sur lui toutes les conséquences de nos péchés, nous qui sommes tous, quelque part, « esclaves du péché » que nous commettons… C’est ainsi que sur la Croix, Jésus reprendra la prière du pécheur, qui, à force d’égarements, est complètement perdu dans ses ténèbres, et devenu aveugle vis-à-vis de Dieu, de sa Lumière spirituelle, de sa Présence à ses côtés… Et alors même que Dieu vit en alliance avec tout homme, et cela depuis que le monde existe (Gn 9,8-17), alors mêmes que « le Verbe est la Lumière véritable qui éclaire tout homme » écrit St Jean (1,9), le pécheur, lui, ne voyant rien, ne percevant plus rien, a l’impression que Dieu l’a abandonné… « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné », dit-il alors dans sa détresse (Ps 22(21)). Et c’est la prière que Jésus reprendra sur la Croix (Mc 15,34)… Par amour, il a voulu vivre en son corps et en son cœur toutes les conséquences de nos fautes – nos ténèbres, nos angoisses, nos morts spirituelles – pour que, gratuitement, par amour, nous puissions retrouver avec Lui la Lumière de Dieu, sa Paix, la Plénitude de sa Vie.

En effet, c’est pour cela que Dieu nous a tous créés : pour que nous participions, par grâce, par amour, grâce au Don qu’il ne cesse de nous proposer, à ce qu’il Est par nature… Et seul le Don de sa Plénitude de Vie accueillie en nos cœurs saura combler cette soif de bonheur que nous avons tous… « Si tu savais le Don de Dieu », dit Jésus à une femme Samaritaine rencontrée au bord d’un puits, « et qui est Celui qui te dit ‘Donne-moi à boire’, c’est toi qui l’aurais prié et il t’aurait donné de l’Eau ViveEn effet, quiconque boit l’eau de ce puits, aura encore soif. Mais qui boira de l’eau que moi je lui donnerai, n’aura absolument plus jamais soif pour toujours » (Jn 4,10-14)… Il sera comblé… Jésus est venu pour cela… « Je suis venu pour qu’on ait la vie et qu’on l’ait en surabondance » (Jn 10,10). « Le salaire du péché c’est la mort ? Le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle dans le Christ Jésus notre Seigneur » (Rm 6,23). « Alors, si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive, celui qui croit en moi ! Comme il est écrit : « Des fleuves d’eau vive couleront de son sein. » Il parlait de l’Esprit », explique St Jean, « que devaient recevoir ceux qui croient en lui »… (Jn 7,37-39). Et lorsque, prenant une autre image, Jésus se présentera comme « le Pain de Vie », il dira : « Je suis le pain de vie. Qui vient à moi n’aura plus jamais faim. Qui croit en moi n’aura plus jamais soif » (Jn 6,35)… Il sera comblé… Et lorsqu’il déclarera ensuite, « et même le pain que je donnerai, c’est ma chair pour la vie du monde », il précisera : « La chair ne sert de rien ; c’est l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,51.63), l’Esprit Saint, le Don de Dieu, l’Eau Vive de l’Esprit, une réalité spirituelle qui est Lumière et Vie, la seule réalité qui peut combler le cœur de l’homme…

Lorsque Pilate, voulant délivrer Jésus, fit venir à côté de lui un brigand, un criminel appelé Barabbas, il demanda à la foule : « Lequel des deux voulez‑vous que je vous libère ? », ils dirent : « Barabbas ! ». Or « Barabbas » signifie « fils du père »… Il représente ici tous les hommes, « créés à l’image et ressemblance de Dieu » (Gn 1,26-28), comme un enfant « ressemble à son papa » (cf. Gn 5,3)… Mais nous sommes tous des pécheurs, tous, d’une manière ou d’une autre, des Barabbas… Ainsi, le Fils Unique et Eternel du Père, lui qui n’avait jamais fait de mal, a-t-il pris, par amour, la place de tous les fils pécheurs que nous sommes… Innocent, il est mort de notre mort, que nous avions pourtant bien méritée par nos fautes, pour que nous puissions vivre de sa vie… Ainsi est la logique de l’amour, prêt à mourir pour toutes celles et ceux qu’il aime, pour leur seul bien, pour leur vie, pour leur bonheur… Ainsi est la logique de Dieu, « lui qui veut que tous les hommes soient sauvés », et participent ainsi à sa Paix et à sa Joie (1Tm 2,3-6 ; Jn 14,27 ; 15,11)…

Prions…

Seigneur Jésus, tu veux notre vie et notre plénitude plus que nous-mêmes… et tu es mort sur une Croix, dans d’atroces souffrances, pour que nous puissions vraiment la vivre. Aide-nous à nous abandonner avec confiance entre tes bras… Donne-nous de pourvoir tout te donner toutes nos misères, nos échecs, nos souffrances… Alors, ta volonté pourra s’accomplir et nous goûterons, avec toi et grâce à toi, à cette seule réalité qui peut combler nos cœurs : la Plénitude de ton Etre, de ta Lumière et de ta Vie… « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos, tant qu’il ne demeure en toi » (St Augustin)…

Diacre Jacques Fournier, Mercredi Saint, 12 avril 2017