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Dès les origines, lorsque Dieu a créé l’homme, il a voulu susciter dans l’existence d’autres lui-même… Des créatures, certes, mais à qui il voulait donner en partage la Plénitude de son Être et de sa vie… « Faisons l’homme à notre image, comme notre ressemblance… Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, mâle et femelle il les créa » (Gn 1,26-28).
Cette expression, « être à l’image et ressemblance de », est caractéristique dans la Bible de la relation ‘père – fils’. Elle disparaîtra d’ailleurs du Livre de la Genèse pour ne revenir qu’au chapitre cinq : « Quand Adam eu cent trente ans, il engendra un fils à sa ressemblance, comme son image, et il lui donna le nom de Seth » (Gn 5,3). Adam est donc bien le papa de Seth, tout comme Dieu en Genèse 1 est le « papa » de tous les hommes.
De plus souvenons-nous de cette si belle précision du P. Ceslas Spicq (O.P.) : « Être l’image, c’est participer l’Être » et la vie « du Dieu vivant ». Le projet de Dieu est donc que l’homme, créature, soit un autre lui-même, participant lui aussi à la Plénitude de son Être et de sa vie… Dieu a ainsi créé tous les hommes « pour nous faire Dieu » (St Athanase). Et voilà ce qui est déjà mis en œuvre lorsque l’homme, tout homme, est lancé dans la vie : il a déjà tout ce potentiel en lui, un potentiel, un trésor, qui ne demande qu’à s’épanouir.
Et avec Jésus, nous découvrons comment cette aventure peut s’accomplir. En effet, Jésus est le Fils éternel du Père qui, à un instant du temps, s’est fait chair, est né de la Vierge Marie, pour nous parler d’homme à homme, de Fils éternellement engendré par le Père à fils et filles créées par ce même Père. « Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu », dira-t-il, Ressuscité (Jn 20,17).
Or Jésus va nous révéler qu’ « être Fils » n’est pas comme un capital que l’on possèderait une fois pour toutes. Lui, il n’a pas été engendré en Fils, comme une action qui serait finie, accomplie, définitivement passée… Il est celui, disons-nous dans notre Crédo, qui est « né du Père avant tous les siècles », et donc avant le temps… Sa naissance ne s’est pas faite à un moment précis, elle est éternelle… Pour nous qui vivons dans le temps, en ce moment, en cet instant présent, le Fils est engendré par le Père. Autrement dit, si le Fils est ce qu’il est, il le doit à un autre que lui-même : il est par le Père qui lui donne ainsi, éternellement, d’être et de vivre… « Je vis par le Père », nous dit-il (Jn 6,57). De lui-même, par lui-même, il n’est rien, il ne peut rien (Jn 5,19-20 ; 5,30).
Voilà ce qu’il est venu nous révéler : notre vocation à être fils ne s’accomplira pas par nous-mêmes, par nos actes, par notre seule volonté, par nos seuls efforts… Non, elle s’accomplira par un Autre que nous mêmes, le Père, et c’est Lui qui nous donnera, dans un acte éternel, tout comme le Fils, d’Être et de vivre de la Plénitude même de son Être et de sa vie. A l’exemple de Jésus, nous sommes ainsi invités à recevoir notre Être et notre vie d’un Autre que nous mêmes… Etre par un Autre, vivre par un Autre, se recevoir en tout ce que nous sommes d’un Autre. Cela suppose donc dès maintenant, par notre foi et dans la foi, une relation continuelle avec cet Autre…
Mais nous ne le savons que trop bien : notre cœur est loin d’être toujours tourné vers le Père, comme l’est celui de Jésus : « Le Fils Unique est tourné vers le sein du Père » (Jn 1,18). Et nous sommes loin de toujours faire ce qui plaît au Père, alors que Jésus, lui, peut dire : « Celui qui m’a envoyé est avec moi, il ne m’a pas laissé seul, parce que je fais toujours ce qui lui plaît » (Jn 8,28).
Heureusement, par tous ses actes et toutes ses paroles, Jésus nous a révélé que « Dieu est Amour » (1Jn 4,8 ;16), éternellement, un Amour qui ne cesse de se donner, de « se répandre », gratuitement : « Dieu nous aime parce qu’il est Amour, et l’Amour tend de nature à se répandre, à se donner » (Pape François). Tous nos péchés, nos manquements, nos misères n’empêcheront jamais Dieu d’Être ce qu’Il Est : Amour, Don gratuit de Lui-même, poursuite inlassable de notre Bien… Et ce Bien par excellence sera total lorsque nous accepterons d’accueillir le Don de Dieu, et d’être ainsi comblés par le Don gratuit de l’Amour… Toute la mission du Verbe fait chair consiste donc à nous réconcilier avec Dieu, pour faire en sorte qu’il en soit vraiment ainsi. Et c’est dans l’accueil immérité de ce Don de Dieu, Don de ce qu’Il Est en Lui-même, que nous deviendrons nous aussi, selon notre condition de créatures, ce qu’il Est en Lui-même, c’est-à-dire… Dieu… « Le Fils de Dieu s’est fait homme pour nous faire Dieu » (St Athanase)…
Prions : « Dieu est Amour » (1Jn 4,8.16), « Dieu est Esprit » (Jn 4,24). « Et l’Amour tend de nature à se répandre, à se donner » (Pape François). Le désir de Dieu est donc que nous acceptions, en toute liberté, de recevoir ce Don gratuit qu’il nous fait de Lui-même, le Don de l’Esprit Saint. C’est pourquoi Jésus nous invite si fortement à le demander. Reprenons donc littéralement, pour nous-mêmes, ses Paroles. Et ensuite, laissons-le faire… Il sait ce qu’il fait… « Moi, je vous dis : Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira. Quel père parmi vous, quand son fils lui demande un poisson, lui donnera un serpent au lieu du poisson ? ou lui donnera un scorpion quand il demande un œuf ? Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! » (Lc 11,9-13).
Père, à l’invitation de Jésus, ton Fils, « l’Unique Engendré » (Jn 1,14.18), nous te demandons l’Esprit Saint. Qu’il soit notre cadeau de Noël. Aide-nous à l’accueillir de tout cœur et à le reconnaître…
Méditations Avent 2018 – Samedi 22 décembre 2018 – Diacre Jacques FOURNIER